LES AMBIGUÏTÉS DU BASSIN
Ce marcheur semble s’arrêter à chaque pas, le temps de trouver son prochain appui. La même animation sur place ne montre plus l’arrêt, remplacé par un recul à chaque pas.
Nous savons qu’un arrêt du bassin devient un recul dans un cycle sur place. Si on tient à marquer l’arrêt, on peut fixer un pied au sol tandis que l’autre fait l’enjambée. Mais c’est stopper la caméra à chaque pas.
Autre astuce, retoucher l’animation de manière à limiter le mouvement du bassin en laissant les pieds glisser correctement.
Si on développe le cycle, le bassin avance.
C’est perdre l’idée de départ.
CORRIGER CES ANIMS, ELLES NE CORRESPONDENT PAS!
On peut chercher un compromis entre les deux cycles, mais il ne sera jamais vraiment satisfaisant, pour des raisons qui ne dépendent pas de l’animateur.
Le passage d’un cycle développé à un cycle sur place peut donner le sentiment d’un mouvement différent entre les deux. De quoi troubler l’animateur qui, souhaitant profiter d’un cycle animé sur place pour en faire un cycle développé, ou inversement, découvre que le rythme obtenu d’un coté se perd un peu de l’autre.
Ce chapitre propose d’expliquer pourquoi.
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- Relativité du point de vue
- Comportement du bassin relativement à son rythme
- Comportement du bassin relativement à son amplitude d’oscillation
- Oscillation linéaire, amortie
- Augmentation des extrêmes de vitesse
- De l’intérêt de chipoter
Relativité du point de vue
Des billes se déplacent relativement à un cadre fixe A et à un cadre en mouvement B.
Relativement à A, la bille verte va à gauche, la bleue est à l’arrêt, et les trois autres, les jaune, orange et rouge, vont à droite à différentes vitesses.
Relativement à B, la bille verte va toujours à gauche, et la rouge, toujours à droite. Mais les trois autres ont changé de statut. La bleue, qui était à l’arrêt, va à gauche, tout comme la jaune, qui allait à droite. La bille orange, qui allait également à droite, est à l’arrêt.
Tout le monde sait que ce que l’on voit d’un point de vue peut être contredit d’un autre, quand bien même les deux montrent la même chose. Simplifiés ainsi, ces rapports paraissent évidents. Mais ils se manifestent de façon plus subtile dès que l’on associe une oscillation au déplacement.
Comportement du bassin relativement à son rythme
Pour comparer les effets de différents rythmes du bassin quand on passe au cycle sur place, tous doivent correspondre au même cycle de marche, et avoir le même axe principal d’oscillation, également axe central du cycle sur place.
Sept rythmes d’oscillation seront commentés
1 – Vitesse constante
2 – Double amorti symétrique
3 – Décélération ferme, avec amorti
4 – Décélération ferme, sans amorti
5 – Accélération ferme, avec amorti
6 – Accélération ferme, sans amorti
7 – Recul du bassin au cours du déplacement
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Vitesse constante
Un bassin à vitesse constante est à l’arrêt dans un cycle sur place. Le pointillé rouge représente la position du bassin à chaque image. Il semble fixe dans les deux cas. En réalité, dans le cycle sur place, il recule d’une distance valant l’écart entre points.
La bille verte, de vitesse différente, montre qu’il y a bien mouvement.
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Double amorti symétrique
Des variations de vitesse font osciller le bassin dans le cycle sur place. Si elles sont régulières, l’oscillation est symétrique relativement à l’axe principal d’oscillation.
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Décélération ferme , avec et sans amorti
L’oscillation tend à se déporter à l’arrière de l’axe principal.
Si on retire tout amorti à la décélération, l’oscillation se déporte entièrement derrière l’axe principal, et semble rebondir sur lui.
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Accélération ferme, avec et sans amorti
L’oscillation tend à se déporter à l’avant de l’axe principal.
Si on retire tout amorti à l’accélération, l’oscillation se déporte entièrement devant l’axe principal, et semble rebondir sur lui.
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Recul
Un bassin qui recule dans son cycle développé oscille symétriquement dans son cycle sur place.
Ce cas ressemble au double amorti symétrique vu plus haut. On ne peut donc déduire du premier coup d’œil que le bassin d’un cycle sur place recule dans son cycle développé.
Pour cela, il faut comparer son amplitude et celle du pas.
Comportement du bassin relativement à son amplitude d’oscillation
Ces cycles montrent des mouvements linéaires du bassin. Cette condition simplifie le rapport entre l’amplitude du bassin et celle du pas. Pour faciliter l’observation, les pattes sont réduites à deux aiguilles. Les équilibres ne sont pas respectés, mais ce n’est pas le sujet.
Ces quatre marches correspondent aux cas suivants
1 – l’oscillation horizontale du bassin est nulle
2 – l’oscillation horizontale du bassin vaut 1/4 de pas
3 – l’oscillation horizontale du bassin vaut 1/2 pas
4 – l’oscillation horizontale du bassin vaut 1 pas
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L’amplitude d’oscillation du bassin est nulle
Les décalages en hauteur de la trajectoire ne correspondent pas au mouvement du bassin, qui est horizontal. Il ne servent qu’à distinguer différents moments du mouvement.
A chaque pas, le bassin avance d’un pas. Le crénelage de la trajectoire indique 1/2 pas à chaque décalage. Sa ligne basse correspond au contact du pied jusqu’à la phase médiane, et sa ligne haute, à la phase médiane jusqu’au levé du pied. Sans oscillation, le bassin effectue la même distance à chaque 1/2 pas, à savoir 1/2 pas.
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L’amplitude d’oscillation du bassin vaut 1/4 pas
L’intégration d’une oscillation au mouvement du bassin affecte son déplacement linéaire, ses aller-retours produisant des variations de vitesse plus ou moins importantes selon son amplitude.
On connait la distance développée des moments aller et retour, en ajoutant l’amplitude d’oscillation à 1/2 pas, en plus pour l’aller, en moins pour le retour. Si l’amplitude d’oscillation du bassin vaut 1/4 pas, le bassin parcourt
→ à l’aller 1/2 pas + 1/4 pas soit 3/4 pas
→ au retour 1/2 pas – 1/4 pas soit 1/4 pas
À chaque fois, la somme des deux moments développés fait un pas.
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L’amplitude d’oscillation du bassin vaut 1/2 pas
Plus augmente l’amplitude d’oscillation, plus s’accentuent les déséquilibres. Le mouvement devient improbable sans recours à des mouvements inverses des jambes ou du tronc.
Si l’amplitude d’oscillation du bassin vaut 1/2 pas, le bassin parcourt
→ à l’aller 1/2 pas + 1/2 pas soit 1 pas
→ au retour 1/2 pas – 1/2 pas soit 0 pas
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Pour imaginer les cas suivants dans la réalité, il faut imaginer un fort mouvement inverse du tronc, voire des semelles aimantées.
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L’amplitude d’oscillation du bassin vaut 1 pas
Le bassin parcourt
→ à l’aller 1/2 pas + 1 pas soit + 1,5 pas
→ au retour 1/2 pas – 1 pas soit – 0,5 pas
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L’amplitude d’oscillation du bassin vaut 1,5 pas
Le bassin parcourt
→ à l’aller 1/2 pas + 1,5 pas soit + 2 pas
→ au retour 1/2 pas – 1,5 pas soit – 1 pas
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L’amplitude d’oscillation du bassin vaut 2 pas
Pour obtenir ce rapport, on a réduit la longueur du pas afin de ne pas étirer démesurément les pattes. Dans le cas présenté, le bassin parcourt
→ à l’aller 1/2 pas + 2 pas soit + 2,5 pas
→ au retour 1/2 pas – 2 pas soit – 1,5 pas
Oscillation linéaire / amortie
Reprenons l’exemple où l’amplitude d’oscillation du bassin vaut 1/4 de pas, et comparons-le avec un même mouvement dont l’oscillation est amortie.
Dans le premier cas, les saccades de la trajectoire permettent de repérer les changements de sens de l’oscillation. Ce n’est plus évident dans le second, où les variations de vitesse sont progressives. On peut toutefois les repérer en comparant pas à pas les deux formes de cycles .
Les écarts entre points verts correspondent tantôt à l’oscillation aller (7-19), tantôt à l’oscillation retour (1-13). Leurs positions sont celles de l’oscillation linéaire, sur place ou développée.
Cette animation lève une première confusion: on ne fait pas correspondre les extrémités de la trajectoire d’oscillation sur place avec les pointes de la trajectoire développée.
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Extrêmes d’oscillation / de vitesse
Ce que montrent les pointes de l’oscillation développée, ce sont les extrêmes lents du bassin (10-22). Les extrêmes rapides, eux, sont en position médiane entre deux extrêmes lents, au « creux de la vague » (4-16).
Les extrêmes d’oscillation (verts) ne sont donc pas des extrêmes de vitesse (roses)…
… même si une oscillation linéaire les confond.
Le point rose en sens aller est l’extrême rapide, celui en sens retour, l’extrême lent.
Augmentation des extrêmes de vitesse
Autre cas de confusion possible, celui ou l’amplitude d’oscillation vaut 1/2 pas. Le retour d’oscillation sur place produit un arrêt quand on le développe. Si on amortit l’oscillation, elle forme une boucle. Là où le bassin marquait un arrêt, il marque désormais un recul.
De deux extrêmes de vitesse, on passe à quatre: deux quand le bassin avance, deux quand il recule.
Les points verts d’oscillation sont doubles, une boucle passant deux fois dessus (10-16, 22-4)
On peut observer pas à pas la formation du phénomène en faisant correspondre les schémas d’oscillations (linéaire et amorti) sur place et leur longueur développée. Les extrêmes de vitesse sont confondus avec les extrêmes d’oscillation si celle-ci est linéaire,…
… décalés si elle est amortie.
De l’intérêt de chipoter
Certains animateurs feront remarquer, pas tout à fait à tort, que tout ceci est un peu chipoter.
Que, lorsqu’on anime une marche, on choisit un point de vue et on s’y tient, sans chercher à savoir si l’effet obtenu serait différent selon un autre point de vue.
D’ailleurs, à bien y regarder, ces différences d’effets ne concernent que quelques cas particuliers, ceux où le sens de déplacement se contredit en passant d’un cycle à l’autre, c’est à dire ceux dont l’amplitude d’oscillation vaut à peu près 1/2 pas.
C’est vrai.
Toutefois, des animateurs qui chipotent, il en existe. Et à ceux-là, il fallait bien répondre.
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© Christophe Clamaron 2022